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L'Accord d'Abidjan pour l'évacuation des réfugiés de Libye mort-né

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Tripoli, Libye, 3  décembre (Infosplusgabon) - De nombreux Libyens et des médias locaux proches du cercle des décideurs à Tripoli ont mis en doute la possibilité de traduire dans la réalité l'accord qui a été conclu à Abidjan au cours du sommet de l'Union africaine (Ua) et de l'Union européenne (Ue), tenu les 29 et 30 novembre dans la capitale économique ivoirienne, sur la crise de l'immigration clandestine en Libye, en vue d'alléger les souffrances de centaines de milliers d'immigrants de plus de 25 nationalités africaines, présents dans des dizaines de villes libyennes, la plupart d'entre eux étant à Tripoli et dans sa banlieue.

 

Le professeur à l'université libyenne Mohamed al-Bahloul a indiqué que "l'Accord d'Abidjan, qui a été fait sur la base de la vidéo de 20 secondes diffusée sur la chaîne américaine CNN n'est rien de plus qu'une décision politique émotionnelle qui ne fera rien bouger dans les eaux stagnantes du phénomène de l'immigration clandestine qui s'est aggravée en Libye depuis plus de 40 ans, ni améliorer les conditions de vie dans leur pays d'origine qui les ont forcés à traverser le désert et la mer à bord d'embarcations de fortune".

 

M. al-Bahloul s'est interrogé: "Comment se fait-t-il que cet accord, qui a été conclu à la hâte, puisse être couronné de succès d'autant plus que tous ceux qui l'ont rédigé à Abidjan ignorent ce qui se passe réellement sur le terrain en Libye, en l'absence des ambassades et des missions internationales, ainsi que de l'incapacité du gouvernement de l'Accord national libyen  de gérer le dossier de la migration contrôlée par des milices armées hors-la-loi, que ce soit en Libye comme pays de transit et d'attraction ou dans les pays d'origine et même dans ceux de destination sur la rive nord de la Méditerranée".

 

Le Sommet d'Abidjan a décidé une série de mesures urgentes pour mettre fin aux pratiques dites de l'asservissement des migrants en Libye. Le président français Emmanuel Macron a déclaré, après une réunion mercredi soir, que l'Union européenne et l'Union africaine et les Nations unies ont convenu de mener "des opérations d'évacuation d'urgence dans les prochains jours ou semaines" pour les immigrants qui sont victimes de traite des êtres humains en Libye.

 

Il a ajouté que l'Union européenne, l'Union africaine et les Nations unies ont décidé d'apporter un soutien accru à l'Organisation internationale pour les migrations (Oim) afin d'aider le retour des Africains qui souhaitent retourner dans leurs pays d'origine, précisant que ce travail se fera dans les prochains jours, en coopération avec les pays concernés, a-t-il dit.

 

En plus de l'évacuation d'urgence des Africains qui veulent quitter rapidement la Libye, M. Macron a annoncé la formation d'une "force d'intervention" des services de police et de renseignement, ainsi qu'une campagne de sensibilisation visant à dissuader les jeunes de migrer.

 

Le journaliste écrivain libyen Ali Moujahid a exprimé, dans un poste sur sa page Facebook vendredi, la crainte que "les décisions du Sommet d'Abidjan ne restent lettre morte, parce qu'elles ne disposent pas de mécanismes nécessaires et de base pour résoudre la crise de l'immigration, même partiellement".

 

Il a, cet égard, dénoncé le point de vue du président Macron au sujet du lancement d'une campagne de sensibilisation visant à décourager les jeunes de migrer, soulignant que la campagne ne fera pas nourrir les millions de bouches affamées en Afrique et ne créera des emplois pour de millions de chômeurs, ce qui représente les principales raisons pour lesquelles les migrants ont fui leurs pays d'origine, en dépit de leur prise de conscience des risques auxquels ils devront faire face.

 

M. Moujahid a ajouté que la solution fondamentale à la souffrance de centaines de milliers de migrants est d'abord d'aider la Libye à sortir de la crise et pousser les parties au conflit en Libye à former un seul gouvernement, arrêter l'ingérence étrangère dans les affaires libyennes, cesser de fournir des refuges pour toutes les personnes impliquées dans le pillage de l'argent public libyen ainsi que les corrompus, les seigneurs de guerres, le trafiquants de migrants et de la traite des êtres humains. Deuxièmement la mise en place de véritables projets de développement dans les pays d'origine encourageant les jeunes à rester dans leurs maisons ".

 

Ali Moujahid s'est demandé "comment bâtir un édifice avant la construction de la fondation"?, soulignant que le sommet d'Abidjan a délibérément, devant la pression de la rue, procédé à  une opération "de jet de poudre aux yeux", car les participants ont résumé les souffrances des migrants dans l'évacuation de 3.800 personnes dans le cadre d'un opération presque impossible, alors que personne ne sait avec précision le nombre des immigrés qui vivent sur le territoire libyen, aussi bien ceux qui rêvent de sauter sur les bateaux de la mort vers l'autre rive de la Méditerranée, ou ceux qui travaillent dans diverses professions depuis des décennies et qui se comptent par dizaines de milliers.

 

L'Union européenne a annoncé vendredi qu'il travaille à accompagner le travail des organismes des Nations unies et les efforts pour mettre en œuvre l'Accord conclu à Abidjan sur certains aspects de la gestion de l'immigration clandestine en Libye.

 

Un porte-parole de l'Union européenne à Bruxelles a indiqué, à ce propos, que l'accent sera mis sur l'accès aux centres de détention afin d'œuvrer au retour des migrants dans leurs pays d'origine et d'autre part pour assurer une protection aux personnes qui en ont besoin, en leur trouvant un pays de transit avant d'être transféré en Europe.

 

Issam Fkina (ingénieur de télécommunications, âgé de 38 ans, travaillant comme agent pour la société de téléphonie mobile internationale à Tripoli) a indiqué qu'il emploie trois Africains de nationalités différentes. Deux d'entre eux l'assistent dans les travaux d'entretien des téléphones mobiles, et l'autre travaille dans le café et le nettoyage, soulignant qu'il semble que l'Union européenne n'est pas sérieuse dans son offre d'aider à soulager les souffrances des migrants en Libye et a cité l'exemple de la décision de la France de recevoir 25 réfugiés sur plus de deux millions d'immigrants qui vivent aujourd'hui en Libye, selon des statistiques officieuses.

 

Le site du journal libyen al-Wassat paraissant au Caire, en Egypte, a affirmé que beaucoup d'incertitudes planent maintenant sur la décision du Sommet d'Abidjan.

 

Dans une longue analyse publiée par le site, samedi, le site a indiqué que l'Union européenne ne dispose pas de réponses claires et précises sur les aspects techniques et pratiques de l'application de l'Accord d'Abidjan, qui peut rester une simple déclaration d'intention dans le cadre d'une opération de relations publiques menées par la France.

 

L'analyse a noté que les Européens et les Africains ne précisaient aucun calendrier pour le plan de lutte contre le mécanisme de migration tout comme les Européens ont été incapables de répondre à la question sur le nombre réel de centres de détention accessibles vu que les organismes des Nations unies disent qu'ils sont incapables d'atteindre quelques-uns des centres contrôlés et exploités par des formations armées en dehors de l'autorité du gouvernement d'union nationale à Tripoli.

 

L'Oim prévoit de mettre en place un centre de transit et de départ à Tripoli pour aider cette catégorie de réfugiés, mais leur trouver une destination acceptable en Europe ne semble pas garantie étant donné que la plupart des pays européens refusent, selon cette analyse, d'accueillir de nouveaux réfugiés. Et la France ne s'est engagée, par exemple, à recevoir que 25 Africains de la Libye et ils n'arrivent de surcroît que seulement dans quelques semaines.

 

Le rapport du site al-Wassat a ajouté dans le même contexte, qu'aucun pays européen n'a  annoncé une volonté d'accueillir quelconque migrant africain ou le financement d'opération de rapatriement des immigrants vers leurs pays. Le nombre d'immigrants qui seront expulsés est estimé à "9.700", après l'approbation par les pays africains de les recevoir sur plusieurs semaines, au rythme de quatre vols par semaine via Royal Air Maroc, une opération complexe et non garantie, de l'avis de nombreux observateurs.

 

Ismail al-Marghani (55 ans, ancien officier de la police libyenne) a mis en doute la possibilité du succès de l'Accord d'Abidjan en particulier en ce qui concerne l'annonce du président français Emmanuel Macron relative à la formation "de force d'intervention de la police et de renseignement" sans indiquer les tâches qui lui sont assignées ou les règles de déploiement en Libye.

 

M. al-Marghani a indiqué que "l'approbation du président du Conseil présidentiel libyen, Fayez al-Sarraj, de cette force sur le territoire libyen, n'a pas été confirmée à ce jour", affirmant, toutefois, que toute force militaire ou de la police étrangère franchissant les frontières libyennes ne seront pas acceptées par les Libyens, auquel cas ils résisteront surtout dans le contexte de la prolifération des armes dans le pays.

 

La plupart des observateurs de la scène libyenne estiment que la décision du Sommet d'Abidjan n'est pas applicable sur le terrain et n'apportera rien de concret pour résoudre la crise des migrants en Libye.

 

Ils soulignent que la meilleure solution pour les centaines de milliers de ces immigrants, la plupart des jeunes et des femmes qui cherchent leur pain quotidien et des opportunités d'emploi pour aider leurs familles dans les pays d'origine, réside dans le règlement de la lutte pour le pouvoir en Libye, en travaillant sur le retour de la stabilité dans ce pays qui reçoit des centaines de milliers de travailleurs africains, et d'autre part, de lancer de véritables projets de développement dans ces pays d'origine de migrants.

 

Ces mêmes observateurs ont mis en garde, en même temps, contre l'approche sécuritaire dévoilée par le Président Macron, pouvant exposer la vie de milliers de migrants africains en Libye en danger.

 

 

FIN/INFOSPLUSGABON/OAI/GABON 2017

 

 

 

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